mardi 8 juin 2010

Intermuse. Introduction

I. Introduction
Quatre heures entre l’aéroport de la capitale de la Turquie et celui de Bruxelles-National. Le survol d’un des grands axes des civilisations et des conquêtes, Danube-Rhin, de l’Anatolie au pays des Celtes rhénans. Le chemin que des civilisations ont parcouru pour peupler les terres de l’Ouest, la route semée de massacres que des Galates ont teinté de rouge sang. Par l’avion ces routes d’aventures millénaires se surplombent en 4 heures.
Dernier vol après une ultime rencontre face à face avec des amis Roumains, Bulgares et Turcs. La conclusion d’un travail de quelques années. Intermuse, un projet Comenius 2 de l’Union Européenne. Il y a quelques années l’IIT, Institutul Intercultural Timişoara, Institut Interculturel de Timişoara avait présenté publiquement le projet aux autorités européennes et aux promoteurs d’autres projets sur la vie entière. Intermuse, Intercultural Education through Museums, Éducation Interculturelle à travers les Musées. C’est aujourd’hui le temps de l’écriture, des doigts qui tracent des propositions pédagogiques.
II. Les mots du projet Intermuse
Intermuse. Éducation interculturelle à travers les musées
• Éducation
Éduquer vient donc du latin educere, e-ducere, conduire hors. Éduquer c’est donc conduire hors de ses limites, accompagner une ouverture sur le monde.
Trop longtemps on a considéré que cette tâche commençait à l’enfance et se terminait au seuil de l’âge adulte. Les parents et les autres éducateurs possédaient un art de vivre, des connaissances (à enseigner), des modes d’emploi auxquels ils initiaient les jeunes pour qu’ils puissent un jour vivre seuls.
La situation a évolué rapidement ces dernières années. D’abord parce que les jeunes sont devenus beaucoup plus autonomes dans leurs apprentissages. Grâce à la télévision, à lnternet, aux rencontres… ils ont accès directement à des connaissances et des modes de vie que leurs aînés n’ont pas vraiment intégrés. Il n’y a plus de vraie rupture entre une période d’acquisition et une longue période de mise en œuvre des acquis. La formation se fait tout au long de l’existence. L’éducation, c’est amener hors de la vie, c’est préparer à sortir de l’aventure humaine, donc à mourir, si possible à la fin d’une vie accomplie.
Si l’éducation est pédagogie (accompagner les enfants), et même anthropogogie (accompagner l’individu humain) parler d’éducation c’est parler de ce qui nous accompagne tout au long de notre vie. Des hommes et des femmes ont accepté le rôle d’être des compagnons de route privilégiés. Dans les premiers âges, c’est le temps des instituteurs, ceux qui instituent. Puis ceux qui osent s’appeler professeurs, maîtres… Et de façon plus permanente, les médiateurs, les animateurs, … ceux des émissions radio ou télévision, ceux des conférences, ceux des musées.
• Interculturelle
C’est une éducation culturelle, interculturelle…
La culture c’est participer, c’est en même temps avoir part et prendre part au monde. Avoir part, se laisser immerger dans ce courant d’impressions, d’informations, de rencontres… Prendre part, c’est les intégrer de façon active, c’est créer, innover, tracer un chemin original.
Et notre monde a de plus en plus de possibilités de se découvrir interculturel. Cette rencontre bénéfique entre cultures se fait entre des groupes jadis séparés par l’espace. La mondialisation culturelle s’approfondit. On redécouvre art et coutumes de l’Afrique, de l’Asie, de mondes ruraux profonds.
Mais on respecte et on confronte aussi des cultures séparées par le temps. L’interculturel couvre temps et espace, c’est un champ de prédilection pour les musées historiques, anthropologiques, ethnologiques ou ethnographiques.
Intermuse en provoquant la rencontre de Turcs, de Bulgares, de Roumains, de Belges… a retrouvé un des grands axes de civilisation. Ensemble, et à grâce à Halil Demirdelen, archéologue au Musée d’Ankara, nous sommes allés ensemble dans la profondeur, dans ces logettes dévolues aux ateliers de jeunes, sur ces plates-bandes où des élèves peuvent tester leur goût de la fouille.
• À travers, par (through)
Pour la rencontre initiale, des représentants de groupe de type Comenius à Bruxelles, à l’Union européenne, il a fallu préparer un feuillet en anglais et en français, et traduire « through ». On aurait pu se contenter d’un insignifiant « par », « au moyen de ». Mais il faut aussi retrouver l’épaisseur historique de ce terme. Through : « from one side or end to the other; into and then out of; covering all parts; from beginning to end of; by means of; in consequence of; up to and including ».
D’un bout à l’autre, d’une fin à la fin, les musées ne sont pas impénétrables. Nous les traversons et ils nous traversent. Ils sont des outils et des ateliers, des pierres posées et des courants d’air. Le parcours sera le thème majeur de ce rapport.
• Les Musées
Les musées sont des bâtiments très divers. Leur rôle est de collecter, de conserver et de valoriser des objets. Ces objets ont souvent une valeur du fait de leur ancienneté, de leur rareté, de leur signification dans l’histoire. Mais on peut imaginer un « Musée éphémère », en promenade perpétuelle, et dont les objets ne survivraient que quelques heures. , cette évocation pourrait définir la « Zinneke Parade » cortège bisannuel de groupes multiethniques, dans des vêtements colorés, trimballant des mécaniques insolites souvent préparés pendant de longs mois et ne connaissant que quelques heures d’existence publique. Dans ce « musée » les visiteurs restent sur place et les objets se déplacent.
Les musées se focalisent chacun sur une gamme d’objets et de pratiques. Autour de la Science, de la Technologie, de l’Ethnographie, de l’Histoire et Archéologie, ou bien souvent de l’Art. Ils permettent les glissements d’un domaine à l’autre : la science et ses instruments, la technologie et les ustensiles de la vie quotidienne liés à un peuple, les lieux que des populations ont bâtis et hantés, les témoins de l’histoire, les œuvres d’art qui ont marqué certaines époques. À l’origine du projet Intermuse on pensait assez fort aux musées scientifiques et archéologiques. Les projets développés de fait tournent autour de l’archéologie et de l’art.
Dans beaucoup de musées, le contenant est en harmonie avec le contenu. Ils occupent des positions stratégiques. « The Art Museum » sur la Place de l’Unité de Timisoara (Timişoara Piaţa Unirii), le Musée historique de Vidin sur la rive du Danube… Le Musée National de Prague (Národní muzeum) surplombant la Place Wenceslas (Václavské náměstí). Les bâtiments du Smithsonian le long de la prestigieuse perspective qui va du Capitole au Mémorial Lincoln. Les Musées Royaux d’Art et d’Histoire dans le parc du Cinquantenaire à Bruxelles.
Ils ont parfois été construits pour devenir musées : le Guggenheim à Bilbao, Beaubourg-Pompidou à Paris et Metz… De fort prestigieux musées sont des salles de palais de monarchies déchues : l’Hermitage à Saint-Pétersbourg, Topkapi à Istanbul, le Louvre parisien évidemment, …
On parle de villes-musées, cités anciennes qui ont gardé in situ une belle partie de leur patrimoine. Ailleurs des musées ont pris la place de lieux détruits, de sites portuaires comme l’Exploratorium de San Francisco ou le « Glasgow Science Center » les rives de la Clyde.
Ils sont aussi dispersés dans la nature, comme ce petit musée de Gordion au pied du tumulus du Roi Midas. Témoins d’activités disparues : charbonnages, entreprises textiles, dans les meilleurs des cas sous forme d’écomusée.

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